Lettres Ouvertes

🌌 Penser le futur. Proche & lointain

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Par Amaury Betton
13 juin · 1 mn à lire
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Cryptos : un projet politique d’extrême droite ?

Dans son dernier livre qui fait le buzz sur les réseaux sociaux, Nastasia Hadjadji, journaliste indépendante, s’en prend fortement au Bitcoin et aux cryptos. Selon elle, derrière les belles intentions affichées par les fervents défenseurs du secteur, se cacherait un projet politique réactionnaire et d’extrême droite. Vrai ou faux ?  

Bonsoir à tous,

Aujourd’hui, je souhaitais publier une lettre 📰 un peu spéciale pour vous parler du livre polémique « No Crypto » (le titre est sans doute un clin d’œil au livre No logo de Naomie Klein sur la tyrannie des marques !?) de Nastasia Hadjadji.

Vous l’aurez compris avec le titre, c’est un livre à charge, un pamphlet même, contre le Bitcoin et l’industrie des cryptos en général, qui fait couler beaucoup d'encre ✍🏻 en ce moment. Le secteur, temple de tous les vices, serait inefficace et même dangereux pour l'économie et la société.

Pour commencer, je peux donner raison à Nastasia sur plusieurs points : les cryptos peuvent engendrer des arnaques à grande échelle (les plus connues comme FTX ou le cas Ruja Ignatova qui fait partie des 10 fugitifs les plus recherchés par le FBI), et générer des phénomènes d’addiction assimilables à ce que l’on peut voir dans l’industrie des jeux 🃏. Parfois, il est même possible de parler de véritables phénomènes d’aliénation ou de déification autour des cryptos.

L’aspect écologique (ou non-écologique plutôt) du Bitcoin est également un sujet à controverse : il est vrai que faire tourner des serveurs jours et nuits, parfois sur le dos des habitants privés d'électricité bon marché, afin de valider des transactions apparait en contradiction totale avec l’urgence climatique ! D’autres rétorqueront que l’impact est minime sur la planète 🌏. Quoi qu’il en soit, le signal n’est clairement pas bon.

Mais le livre est aussi très intéressant dans la mesure où il met en avant un aspect souvent oublié des débats autour de ces OVNI 🛸 numériques : le Bitcoin est, à l’origine, un projet politique qui vise à créer un système financier parallèle, libéré du poids des intermédiaires (privés ou publics). ⚠️ Problème : ce projet serait, selon l’auteure, d’extrême droite, via ses fondateurs (des libertariens) et ses maîtres à penser d’aujourd’hui, des ultra-libéraux sans foi ni loi.   

Et c’est là que le bât blesse selon moi et, pour plusieurs raisons :

  • Les libertariens promeuvent un État minimal mais ne sont pas forcément d’extrême droite. Certains sont même progressistes sur les questions sociales et culturelles. Ils sont donc difficilement catégorisables ;

  • Les utilisateurs des cryptos viennent aujourd’hui de tous les bords politiques, de la gauche comme de la droite, et du centre, mais aussi des extrêmes. Ils ne forment pas un bloc monolithique, ils représentent plutôt la société dans sa complexité et sa diversité ;

  • Les pratiques spéculatives et l’intérêt pour les gains de court terme ne datent pas d’hier. Susan Strange l’écrivait déjà dans son livre 📚 ‘Casino Capitalism’ en 1986, bien avant que les cryptos n’apparaissent. Ce trait de comportement n’a pas de ‘coloration’ politique, il est simplement trop répandu ; 

  • Les cryptos reposent sur une technologie, qui par définition, n’a pas d’étiquette politique et qui a de l’intérêt (même les banques centrales s’y mettent). Tout dépend donc de l’usage que l’on souhaite en faire : le pire ou le meilleur.

Pour toutes ces raisons, si les cryptos ont une composante politique indéniable, elles ne me semblent pas être un projet d’extrême droite.

À très vite,

Amaury ❤️